Le jeudi 16 janvier 2020 a marqué une nouvelle étape dans l’affaire judiciaire la plus célèbre et la plus mystérieuse de l’histoire criminelle récente en France. L’affaire du petit Grégory.
La chambre d’instruction de la Cour d’Appel de Paris a annulé la garde à vue de Murielle Bolle. Une garde à vue au cours de laquelle celle-ci avait accusé son beau-frère, Bernard Laroche, d’avoir enlevé le petit Grégory Villemin. Le dossier ne compte donc plus les propos qu’elle a tenus devant les gendarmes. La justice n’a cependant pas annulé les déclarations que Murielle Bolle avait faites aux forces de l’ordre avant le début de cette garde à vue. Ni son audition devant le juge Lambert. Au cours de cet interrogatoire, elle avait également accusé son beau-frère.
La Cour d’Appel a considéré, à l’instar de la Cour de Cassation, que “la garde à vue de Mme Bolle a été effectuée en application de dispositions déclarées inconstitutionnelles », relevant de l’ordonnance du 2 février 1945 sur l’enfance délinquante. En effet, cette loi ne prévoyait ni la présence d’un avocat ni la notification du droit de se taire. Ce qui transgressait les droits élémentaires et donc « constitutionnels » de Murielle Bolle, mineure à l’époque des faits.
Affaire du petit Grégory : une énigme persistante
La nouvelle rédaction de l’article 4-2 de la loi du 2 février 1945 prévoit que “le mineur poursuivi doit être assisté d’un avocat. À défaut de choix d’un avocat par le mineur ou ses représentants légaux, le procureur de la République, le juge des enfants ou le juge d’instruction fait désigner par le bâtonnier un avocat d’office.”
Cette décision repose en grande partie sur l’avis du Conseil Constitutionnel. En novembre 2018, ce dernier avait jugé que les droits fondamentaux de Murielle Bolle, âgée de 15 ans et donc mineure à l’époque de sa garde à vue en 1984, n’avaient pas été respectés. Lors de cet interrogatoire, Murielle Bolle avait accusé son beau-frère Bernard Laroche d’avoir enlevé en sa présence le petit Grégory. On avait retrouvé mort celui-ci dans la Vologne, à Docelles, le 16 octobre 1984. À ce jour, l’affaire du petit Grégory reste encore un mystère.
Prise d’effet de la déclaration d’inconstitutionnalité
La Cour d’Appel de Paris a donc rendu son arrêt dans les termes suivants : “la garde à vue de Murielle Bolle en 1984, interrogée sans la présence d’un avocat ni de ses parents et sans qu’on lui notifie son droit à garder le silence, n’était pas conforme à la Constitution.” Cela ouvre la porte à une annulation de ses déclarations aux yeux de la justice. Notamment ses accusations à l’égard de Bernard Laroche.
Cette inconstitutionnalité porte sur des dispositions qui ne sont plus en vigueur. En conséquence, une disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut plus être appliquée dans les instances en cours. Et ce, à la date de la publication de la décision du Conseil Constitutionnel. En l’espèce, les Sages ne reportent pas la prise d’effet de la déclaration d’inconstitutionnalité. Il faut donc en conclure qu’elle peut dès à présent s’appliquer aux affaires non jugées définitivement.