Depuis le 1er janvier 2023, l’intermédiation financière s’applique systématiquement à toutes les pensions alimentaires impayées. Cette extension vise plusieurs objectifs dont celui de préserver les intérêts de l’enfant. Le point dans cet article.
Selon l’INSEE, 128 000 divorces ont été prononcés en France en 2016, dont plus de la moitié par consentement mutuel. Si la séparation d’un couple marié se passe bien dans la plupart des cas, il peut arriver que celle-ci soit plus problématique. Ainsi, une séparation peut rapidement engendrer d’autres difficultés. C’est le cas notamment lorsque le couple a eu des enfants, nés pendant ou hors mariage ou adoptés. Et que l’un des deux parents ne respecte pas ses obligations parentales à leur égard.
L’article 373-2-2 du Code civil fixe les modalités et les garanties de la pension alimentaire. Selon le cas, que l’un des parents doit à l’autre, ou qui est due à la personne à laquelle l’enfant a été confié. Celle-ci prend le plus souvent la forme d’un versement mensuel d’une somme d’argent pour laquelle on considère les revenus des deux parents pour en fixer le montant.
Pour autant, il peut arriver que le parent devant une pension alimentaire à l’autre ne la lui verse pas dans les délais impartis, voire pas du tout. Dès lors, il risque une condamnation pour abandon de famille. En outre, le parent lésé peut intenter plusieurs actions afin de percevoir la ou les pensions alimentaires impayées. Parmi elles figure l’intermédiation financière des pensions alimentaires (IFPA), généralisée depuis le 1er janvier 2023.
Abandon de famille : définition
L’abandon de famille est un délit pénal prévu par l’article 227-3 du Code pénal. La sanction est de deux ans d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Dans les faits, il consiste à ne pas honorer une obligation familiale prévue par une décision. Celle-ci peut provenir :
- D’une convention de divorce ou de séparation de corps,
- D’un acte authentique notarié,
- D’une convention à laquelle un organisme social a donné force exécutoire,
- D’un jugement.
Dans le cadre de pensions alimentaires impayées, et pour que la qualification du délit d’abandon de famille puisse avoir lieu, il est nécessaire, d’une part, que le défaut de paiement soit caractérisé. Et ce, pendant une durée d’au moins deux mois.
D’autre part, il faut être en mesure de prouver que le parent débiteur refuse de s’en acquitter malgré le fait qu’il en ait connaissance. À défaut, il est impossible de retenir le délit d’abandon de famille. C’est le cas, par exemple, lorsque le parent débiteur ne dispose pas des moyens financiers et/ou matériels pour honorer son obligation alimentaire.
Intermédiation financière : désormais appliquée à TOUTES les pensions alimentaires
Les pensions alimentaires impayées initient un nombre toujours croissant de contentieux souvent oppressants. En premier lieu, pour le parent chez lequel l’enfant a sa résidence principale et qui dispose de ressources financières moins importantes suite à sa séparation. Ce constat a encouragé le législateur à simplifier les démarches de recouvrement des impayés. D’où la généralisation, au 1er janvier 2023, de l’intermédiation financière (IFPA) pour toutes les pensions alimentaires fixées dans un titre exécutoire. En d’autres termes, “qu’il s’agisse d’une décision judiciaire ou d’un titre extrajudiciaire comme une convention de divorce par consentement mutuel.”
Cette généralisation de l’IFPA intervient à la suite de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 du financement de la Sécurité Sociale pour 2022, complétée par le décret n° 2022-259 du 25 février 2022 puis par la circulaire du 28 février 2022. Elle n’affecte pas certaines situations exceptionnelles. Par exemple, en cas de refus des parents, de violences intrafamiliales prouvées ou de difficultés d’exécution. Ceci étant dit, l’intermédiation financière des pensions alimentaires confère à la Caisse d’allocations familiales (CAF) ou à la Mutualité Sociale Agricole (MSA) le rôle d’intermédiaire entre les parents pour le règlement des pensions alimentaires que l’on destine aux enfants.
Aucune avance des pensions alimentaires impayées
L’intermédiation financière s’applique désormais systématiquement à toutes les pensions alimentaires. Toutefois, il ne s’agit en aucun cas de verser à l’avance ces dernières et/ou à la place du parent débiteur. En revanche, la CAF et la MSA conservent la possibilité d’avancer le versement de l’allocation de soutien familial (ASF) recouvrable en attendant le versement des pensions alimentaires impayées.
Pour rappel, l’ASF est une allocation familiale accordée pour élever un enfant privé de l’aide de l’un de ses parents voire des deux. Son montant est, au maximum, de 184,41 euros par enfant et par mois (245,80 euros si l’enfant est privé de ses deux parents). Son versement peut intervenir si :
- La pension alimentaire est en cours de fixation.
- Si celle-ci est d’un faible montant.
- Enfin, en cas d’absence de versement.
IFPA : les avantages de la réforme
Au-delà de l’enjeu économique majeur lié au fait de garantir le versement des pensions alimentaires, l’extension de l’IFPA constitue un signal positif fort à l’égard des familles monoparentales et de la protection des intérêts de l’enfant. En effet, l’objectif est de préserver ces derniers des tensions entre leurs parents qui naissent souvent à cause de pensions alimentaires impayées. Et ce, tout en assurant la mise en place des dispositions nécessaires pour contraindre le parent débiteur à respecter son obligation familiale.
De fait, celui-ci se doit de respecter des délais afin de communiquer les éléments utiles à la gestion de l’IFPA. S’il se dérobe, il risque en premier lieu des sanctions financières. Puis un recouvrement forcé des pensions alimentaires impayées. Et ce, sans que le parent créditeur n’ait à faire de démarche particulière. L’idée est donc tout autant d’accélérer les paiements tout en réduisant le nombre et la durée des arriérés. À cette fin, le Ministère de la justice a initié le recrutement de 200 emplois de greffe dès mars 2022. En effet, c’est au greffe qu’incombe maintenant la notification des décisions de condamnation aux deux parents.