En matière de filiation, la présomption de paternité fait figure de processus clé pour garantir à l’enfant à naître ou déjà né une bonne visibilité quant aux liens qui l’unissent à ses parents, ainsi qu’au reste de sa famille. Si la présomption de paternité s’applique dans la grande majorité des couples mariés, elle peut parfois être écartée. Et lorsque le couple n’est pas marié, il lui faut entamer les démarches adéquates pour que la filiation soit reconnue. On fait le point dans ce nouvel article.
Publié en début d’année, le bilan démographique de la France en 2024 a fait l’objet de nombreux articles dans les médias. En cause : la baisse continue de la fécondité. Ainsi, 663000 bébés sont nés dans l’Hexagone en 2024, contre 678000 en 2023, et 818600 dix ans plus tôt. Au regard de la nouvelle hausse de la mortalité, cela aboutit à un solde naturel en 2025 à son plus bas niveau depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
Les Français font donc moins d’enfants. Qui plus est, la majorité d’entre eux naissent hors mariage. Selon l’Institut national d’études démographiques (INED), la part des naissances hors mariage atteint près de 57 % du total des naissances en 2023. De fait, la présomption de paternité ne s’applique pas à ces naissances. Comment établir la filiation entre le père et son enfant dans ce cas ? La présomption de paternité s’applique-t-elle systématiquement ? Comment la rétablir si elle a été écartée ?
Quid de la présomption de paternité ?
Maître Elfried Dupuy-Chabin : L’article 312 du Code civil prévoit que “l’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari.” Autrement dit, le mari de la mère de l’enfant est présumé être le père de ce dernier. Et ce, sans qu’il n’ait l’obligation de réaliser une quelconque démarche de reconnaissance après la naissance de l’enfant afin d’établir la filiation. De fait, son nom est ajouté à l’acte de naissance officiel.
Dans quels cas la présomption de paternité peut-elle être écartée ?
Maître Elfried Dupuy-Chabin : L’article 313 du Code civil prévoit trois situations dans lesquelles la présomption de paternité est écartée.
- D’une part, “lorsque l’acte de naissance de l’enfant ne désigne pas le mari en qualité de père.”
- D’autre part, quand l’enfant est né plus de 300 jours après l’introduction d’une après l’introduction de la demande en divorce ou en séparation de corps ou après le dépôt au rang des minutes d’un notaire de la convention réglant l’ensemble des conséquences du divorce.
- Enfin, quand il est né moins de 180 jours depuis le rejet définitif de la demande de divorce ou après la réconciliation des époux.
La présomption de paternité peut-elle être rétablie après avoir été écartée ?
Maître Elfried Dupuy-Chabin : Oui. Toutefois, pour être rétablie de plein droit par voie judiciaire (ou par l’enfant lui-même durant les dix années qui suivent sa majorité), deux conditions doivent être réunies selon l’article 314 du Code civil :
- Tout d’abord, il faut que l’enfant dispose de la possession d’état à l’égard du mari. L’article 311-1 du Code civil précise le sens de cette possession et ce qu’elle implique. Concrètement, celle-ci se doit d’être continue, paisible et non équivoque. Le mari a élevé l’enfant comme le sien et ce dernier porte son nom. Sa qualité de père est reconnue non seulement par la famille, mais aussi par la société et l’autorité publique.
- En outre, aucune autre filiation paternelle n’a déjà été établie à l’égard d’un tiers.
Que se passe-t-il en cas de conflit de paternité, alors qu’une présomption existe déjà à l’égard du mari ?
Maître Elfried Dupuy-Chabin : Lorsqu’un homme déclare l’enfant de manière anticipée alors que la présomption de paternité est établie à l’égard du mari, c’est la présomption qui prime. Malgré tout, et du fait que ce conflit soit pris en charge par le procureur de la République, l’accompagnement d’un avocat en droit de la famille peut être déterminant. Contactez mon cabinet pour une étude personnalisée de votre situation.
La présomption de paternité vaut-elle aussi pour un concubin ou un partenaire de PACS ?
Maître Elfried Dupuy-Chabin : Non. Le terme “mari” s’entend dans le sens strict du terme. Pour toute naissance ayant lieu dans un couple non-marié, la reconnaissance de l’enfant est obligatoire pour le père. Pour la mère, son nom doit figurer sur l’acte de naissance de l’enfant.
Cette page du site du Service Public partage toutes les informations essentielles relatives à la reconnaissance d’un enfant hors mariage. Deux points méritent d’être soulignés :
- La démarche de reconnaissance de l’enfant est un acte volontaire et personnel. Autrement dit, elle n’engage que celui ou celle qui l’initie. Elle ne nécessite pas l’accord de l’autre parent ou celui de l’enfant.
- La reconnaissance de l’enfant peut avoir lieu à n’importe quel moment : avant la naissance, au moment de la déclaration de naissance, ou après. Si son auteur(e) est mineur(e), ou qu’il/elle est sous tutelle ou sous curatelle, il/elle peut l’initier sans assistance.
Quelle démarche pour la reconnaissance d’un enfant par un couple de femmes ?
Maître Elfried Dupuy-Chabin : Dans le cadre d’un projet d’Assistance médicale à la procréation (AMP), ou de Procréation médicalement assistée (PMA), un couple de femmes a l’obligation de réaliser une reconnaissance conjointe anticipée. Et ce, quel que soit le régime matrimonial du couple (mariage, PACS ou union libre). Cette reconnaissance a lieu devant notaire.
Dans cette autre page du Service Public, découvrez les conditions de réalisation de cette reconnaissance conjointe. On note que :
- D’une part, la reconnaissance conjointe de l’enfant après la déclaration de naissance n’est plus possible depuis le 4 août 2024.
- D’autre part, aucun lien juridique n’existe entre l’enfant et le donneur de gamètes. La loi le considère comme “tiers-donneur”. Par conséquent, il lui est impossible d’établir un quelconque lien de filiation avec l’enfant.
Vous êtes en instance de divorce et vous vous interrogez quant à l’application de la présomption de paternité pour votre nouvel enfant à naître ? Une reconnaissance infondée a été initiée à l’égard de votre enfant dans le seul but de vous porter préjudice ? Vous avez besoin d’informations adaptées à votre cas quant à la possession d’état ? Planifiez un premier rendez-vous avec moi, à mon cabinet ou à distance.