Lorsque des risques graves peuvent compromettre la santé physique, mentale et/ou psychologique d’un enfant au sein même de sa famille, mais également sa sécurité physique, matérielle, sa moralité et son éducation, le juge des enfants peut ordonner des mesures d’assistance éducative. Et ce, afin de l’en préserver et de garantir ses droits.
Chaque semaine en France, un enfant meurt sous les coups de ses parents. Tel est le constat alarmant partagé par le comité interministériel à l’enfance, qui s’est tenu le 20 novembre 2023. Il a révélé, en outre, que le service national d’accueil téléphonique pour l’enfance en danger (119) avait traité 40 334 situations d’enfants en danger ou en risque de danger en 2022. Ainsi qu’une hausse de 16 % des violences intrafamiliales non conjugales, notamment physiques et sexuelles, entre 2020 et 2021.
De fait, un plan de lutte contre toutes les formes de violences faites aux enfants a été initié par le comité. Son but : instituer une “véritable culture de la protection des enfants”. Et ce, dans la continuité des actions déjà menées dans ce sens, à l’instar de :
- L’entrée en vigueur, le 1er janvier 2024, du décret relatif aux nouveaux pôles spécialisés en matière de violences intrafamiliales.
- La promulgation de la loi Taquet, le 7 février 2022, relative à la protection des enfants. Celle-ci intègre notamment plusieurs objectifs consistant à améliorer la procédure d’assistance éducative.
Assistance éducative : de quoi s’agit-il ?
En droit français, les mesures relatives à l’assistance éducative sont encadrées par une dizaine de textes. Elles sont prévues par les articles 375 à 375-9 du Code civil. Elles couvrent un large éventail de situations et de réalités. Le juge des enfants peut en prendre une ou plusieurs afin de protéger un mineur en péril. Il peut s’agir :
- De mesures de suivi à domicile et d’aide à la famille.
- Ou bien encore, de mesures de placement en Protection de l’enfance. Plusieurs structures existent, comme les familles d’accueil ou les lieux de vie et d’accueil.
Autant que faire se peut, le juge des enfants tente de maintenir l’enfant dans sa famille. Autrement dit, il décide d’une mesure de placement dans les cas les plus graves. Cette décision ne retire pas l’autorité parentale aux parents de l’enfant. Toutefois, elle place ce dernier sous la responsabilité du Président du Conseil départemental pour qu’il soit pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE), comme le prévoit l’article L221-1 du Code de l’action sociale et des familles.
En 2021, le nombre d’accueil à l’ASE a progressé de 2,4 % par rapport à l’année précédente. En tout, 377 000 mesures d’ASE ont été initiées, dans la majorité des cas, à la suite d’une décision de justice (dossier sur l’ASE de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), paru le 26 octobre 2023).
Quelles autres mesures ?
Dans cette page, exposant notamment les informations essentielles concernant la saisine du juge des enfants en cas de risques graves pesant sur un mineur, on apprend que celui-ci peut également ordonner :
- Une médiation familiale : suivant deux conditions. D’une part, dès lors que les deux parents l’approuvent. D’autre part, si elle accompagne une autre mesure d’assistance éducative.
- Une interdiction de sortie du territoire : là aussi, cette interdiction doit être associée à une autre mesure d’assistance éducative. Elle peut concerner, par exemple, un enfant placé par le juge chez l’autre parent.
Loi Taquet : quels impacts sur le cadre légal de l’assistance éducative ?
Les articles 375 à 375-9 du Code civil ont été modifiés par plusieurs lois, à l’instar de la loi n°2022-140 du 7 février 2022, dite loi Taquet. L’objectif de cette loi selon l’instigateur du projet, Adrien Taquet, est de “faire de l’enfant un sujet de droits”. Et ce, à travers des engagements importants :
- Des actions précoces destinées à répondre aux besoins de l’enfant et de sa famille.
- Une sécurisation des parcours des enfants protégés.
- Des moyens supplémentaires pour permettre aux enfants d’agir, mais aussi pour garantir leurs droits et leur avenir.
Dans cette optique, le décret n° 2023-914 du 2 octobre 2023 d’application de la loi Taquet a, notamment, précisé les conditions pour désigner un administrateur ad hoc.
Celui-ci est responsable de l’assistance d’un enfant en danger non capable de discernement. Les enfants non discernants sont souvent très jeunes, voire des nourrissons. Cette disposition réglementaire s’inscrit dans l’amélioration de la procédure relative à l’assistance éducative, visant à prendre davantage en considération la parole de l’enfant.
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Le juge des enfants évalue la situation de danger de l’enfant mineur après avoir pris connaissance de l’ensemble des éléments recueillis :
- Dans un premier temps, par la Cellule de recueil d’informations préoccupantes (CRIP). Souvent, celle-ci est elle-même saisie par le personnel de l’école, celui de la Protection maternelle et infantile (PMI), ou par un médecin qui suit l’enfant.
- Dans un second temps, et une fois le rapport d’évaluation terminé, la CRIP transmet ce dernier au parquet des mineurs. Et ce, afin de laisser le soin au Procureur de la République de saisir le juge des enfants, s’il considère que le ou les dangers sont avérés.
Dans les situations les plus graves ou urgentes, le parquet des mineurs peut être saisi directement par le ou les parents. Ou bien encore, par les services de police, les services sociaux. Mais aussi par tout tiers informé d’un danger grave encouru par l’enfant.
À l’heure actuelle, les violences faites aux enfants sont très largement prises en considération dès la naissance, du fait de la vigilance des professionnels intervenants auprès de l’enfant dès le service de la maternité à l’hôpital, en passant par la crèche ou la nounou et enfin l’école.
La loi Taquet a renforcé les actions de prévention et de coordination des acteurs de l’enfance. Le but : ne pas laisser des situations émerger ou se dégrader au sein des familles en difficultés. Il existe donc plusieurs dispositifs et lieux d’écoute, de renseignements et de paroles. Leur rôle est de prévenir, encadrer et aider l’enfant quel que soit son âge.