La Cour de Cassation s’est prononcée pour la première fois sur la répartition des rôles entre le juge des enfants et le gardien de l’enfant. Et ce, quant aux modalités d’organisation d’un droit de visite médiatisé sur un enfant placé au titre de l’assistance éducative.
La première chambre civile de la Cour de Cassation a rendu deux arrêts le 15 janvier 2020 par. Elle a mis en œuvre, pour la première fois, l’article 1199-3 du Code de procédure civile. Il est issu du décret n° 2017-1572 du 15 novembre 2017. Il s’agissait qu’elle se prononce sur la répartition des rôles entre le juge des enfants et le gardien de l’enfant quant aux modalités d’organisation d’un droit de visite médiatisé sur un enfant placé. Le premier arrêt est un arrêt de rejet (arrêt n° 27, n° 18-25.313), le second de cassation (arrêt n° 28, n° 18-25.894).
L’article 1199-3 du Code de procédure civile prévoit que “la fréquence du droit de visite en présence d’un tiers est fixée dans la décision judiciaire. Sauf à ce que, sous le contrôle du juge, les conditions d’exercice de ce droit soient laissées à une détermination conjointe entre le ou les parents et la personne, le service ou l’établissement à qui l’enfant est confié.”
Dans les deux affaires, il s’agissait de savoir si le juge des enfants avait rempli son office. En outre, dans la détermination des modalités d’exercice de ce droit. Ce que les mères des enfants, demanderesses au pourvoi dans les deux procédures, contestaient.
Droit de visite médiatisé sur un enfant placé : le rôle du juge des enfants
La question de la fixation des modalités d’exercice du droit de visite des parents à l’égard d’un enfant placé est hautement sensible. Et ce, en raison du danger que celui-ci court. En effet, ce droit de visite traduit symboliquement et concrètement le maintien des attributs de l’autorité parentale. Autrement dit, les parents continuent à l’exercer. Dans ce sens, le législateur accorde une grande importance au maintien des liens entre l’enfant placé et sa famille.
La question est donc celle de l’articulation du principe selon lequel le juge des enfants “fixe les modalités” du droit de visite médiatisé d’un enfant placé accordé aux parents. Ainsi que les dispositions spéciales prévues lorsque l’exercice d’un tel droit de visite doit avoir lieu en présence d’un tiers. En effet, la tentation existe pour certains juges de déléguer au gardien de l’enfant l’organisation du droit de visite. Très souvent, c’est dans le but de conférer souplesse et adaptabilité à la solution à mettre en place. En parallèle, il s’agit de limiter les allers-retours devant le juge.
Pour autant, le contentieux ne s’est pas tari
Dans le premier arrêt (arrêt n° 27, préc.), la Cour de Cassation a encore voulu rappeler que le juge ne pouvait pas fixer, en faveur de la mère, un “droit de visite libre” dont “les modalités seront fixées en concertation entre celle-ci et le service auquel les enfants sont confiés”. Sur ce point, elle casse donc l’arrêt d’appel pour violation de l’article 375-7, alinéas 4 et 5. Motif : il incombait au juge de définir la périodicité du droit de visite simple. En prévoyant un droit de visite “libre”, la Cour d’appel avait méconnu l’étendue de ses pouvoirs.
Dans le second arrêt, le juge des enfants avait accordé aux deux parents “un droit de visite médiatisé qui s’exercera sous le contrôle du service gardien, sauf à en référer au juge en cas de difficultés”. Dans ce cas, le juge des enfants n’avait pas fixé la périodicité du droit de visite. Qui plus est, il avait confié la fixation de ces modalités, certes sous son contrôle, au seul gardien de l’enfant. Et ce, sans la subordonner à un accord entre ce dernier et les parents bénéficiaires.
Il semble résulter de l’article 1199-3 du Code de procédure civile précité que, lorsque le droit de visite est prévu en présence d’un tiers, le principe est que le juge fixe la fréquence de ces visites. À moins qu’il ne transfère l’ensemble des modalités de l’organisation de ce droit au gardien de l’enfant. Et ce, en collaboration avec le parent concerné et sous son contrôle. Par conséquent, ces arrêts font une stricte application des textes et notamment de l’article 1199-3 du Code de procédure civile.