L’homologation des vaccins anti-Covid-19 par l’OMS est le fruit d’un protocole expert. Celui-ci vise à répondre à l’urgence sanitaire et à veiller au respect des critères d’innocuité, d’efficacité et de qualité. Pourquoi certains de ces vaccins ne sont-ils reconnus ni par l’EMA, ni par la France ? Quels sont les impacts de cette situation sur les Français de l’étranger et le déploiement de stratégies vaccinales régionales durables et pertinentes ?
L’homologation des vaccins anti-Covid-19 par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), au titre de la procédure pour les situations d’urgence de santé publique (EUL pour Emergency Use Listing), poursuit plusieurs objectifs. Elle a pour but de permettre aux pays d’accélérer leurs propres procédures d’approbation réglementaire. Notamment pour importer et administrer le vaccin. En parallèle, elle vise à donner l’opportunité à l’UNICEF et à l’Organisation panaméricaine de la Santé d’acheter les vaccins pour les distribuer à des pays qui en ont besoin. À ce jour, plusieurs laboratoires ont déjà obtenu ce label EUL pour leur vaccin. On peut citer Pfizer/BioNTech, AstraZeneca-SKbio, Serum Institute of India, Janssen, Moderna.
Récemment, des vaccins à virus inactivé ont rejoint cette liste. Il s’agit de ceux fabriqués par Sinopharm pour le premier et par Sinovac pour le second. Toutefois, ils ne sont reconnus ni par l’Agence Européenne du Médicament (EMA), ni par la France. Par conséquent, ils ne donnent pas droit au passe sanitaire français. De quoi plonger les dizaines de milliers de compatriotes de l’étranger dans un profond désarroi. Comme ce fut le cas cet été à l’occasion de leur retour dans l’Hexagone pour les vacances. Comme cela le sera lors de leurs prochains congés et déplacements si la situation persiste. Ainsi, entre recommandations contradictoires et réalités de terrain, de nouveaux défis attendent les instances publiques en matière de politique sanitaire dans les semaines à venir.
Homologation des vaccins anti-Covid-19 : comment repositionner les labels EUL de l’OMS au cœur de la stratégie vaccinale française ?
En début d’année, les Français de l’étranger avaient reçu comme consigne du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères de s’inscrire dans le schéma vaccinal proposé par les autorités de leur pays de résidence. Dans cette optique, beaucoup d’entre eux ont bénéficié d’un vaccin autre que ceux reconnus par l’EMA. De fait, ils ont été surpris d’apprendre cet été que celui-ci les privait de l’obtention du passe sanitaire en France.
Une situation d’autant plus ubuesque que l’homologation des vaccins anti-Covid-19, au titre de la procédure pour les situations d’urgence de santé publique (EUL) initiée par l’OMS, vise précisément à harmoniser les dispositifs mis en place à l’échelle globale. Pour ce faire, cette homologation suit un protocole strict pour atteindre deux objectifs complémentaires :
- D’une part, rendre ces vaccins disponibles le plus rapidement possible et faire face à la situation d’urgence sanitaire, aussi bien dans les pays développés que dans les pays en voie de développement.
- D’autre part, s’assurer du respect des critères d’innocuité, d’efficacité et de qualité. Et ce, par des experts indépendants et d’autres invités issus d’autorités nationales, ainsi que des équipes de l’OMS.
Homologation des vaccins anti-Covid-19 : la réponse du COSV
Le 2 juin 2021, le Conseil d’Orientation de la Stratégie Vaccinale (COSV) en France a dû se prononcer suite à la saisine, quelques jours plus tôt, du Directeur Général de la Santé. Il s’agissait que ce dernier puisse statuer sur la conduite à tenir quant à la vaccination des Français de l’étranger et des personnes étrangères résidents en France, vaccinés avec un vaccin pas encore autorisé en France.
L’avis du COSV a débouché sur plusieurs conclusions quant aux vaccins qui ne sont encore reconnus ni par l’EMA, ni par la France :
- En premier lieu, qu’il est possible de considérer les seules personnes ayant reçu un schéma vaccinal complet avec le vaccin Sinopharm ou celui de Sinovac comme étant protégées.
- De plus, qu’il est nécessaire de procéder à l’administration d’une dose supplémentaire d’un vaccin autorisé en France pour les personnes ayant reçu une unique dose de vaccin Sinopharm ou Sinovac.
- Enfin, que les autres vaccins n’ouvrent droit à aucune reconnaissance de la France à l’heure actuelle. Et ce, qu’ils bénéficient ou pas d’un label EUL de l’OMS. De fait, les personnes vaccinées avec l’un d’entre eux (ex. : le vaccin russe Spoutnik V) doivent prouver un schéma de vaccination complet avec l’un des vaccins autorisés dans l’Hexagone pour bénéficier du passe sanitaire.
Recommandations complémentaires du COSV
Par la voix de son président, le Professeur Alain Fisher, le COSV a précisé deux recommandations complémentaires. Dans un premier temps, il a souligné la nécessité d’adopter une stratégie vaccinale concordante avec les recommandations de l’OMS. Autrement dit, de considérer ses évaluations à leur juste valeur dans le cadre des homologations des vaccins anti-Covid-19 au titre de l’EUL.
En outre, le Professeur Fisher a mis en avant le fait que les vaccins utilisés en France se devaient de répondre aux formes virales circulant dans le pays. “Début juin 2021, le variant B.1.1.7 (cad, le variant anglais) est majoritaire en France et représente près de 80% des cas” a-t-il rappelé. De fait, les vaccins produits par Sinopharm et Sinovac répondent à cette condition.
Homologation des vaccins anti-Covid-19 et stratégie vaccinale : une corrélation étroite et déterminante
La vaccination est un acte médical qui n’a rien d’anodin, au-delà des propos et des comportements extrémistes des “provax” et des “antivax”. Ces derniers mois, parmi les gens vaccinés et ceux qui ne le sont pas, plusieurs profils se détachent. D’un côté, il y a ceux qui se vaccinent, entre autres :
- Pour des raisons d’âge avancé et/ou médicales.
- Par peur du virus et de ses conséquences.
- Et/ou pour ne pas subir les contraintes sociales liées notamment au passe sanitaire.
De l’autre côté, il y a ceux qui ne se vaccinent pas, notamment :
- Du fait de contre-indications médicales.
- De risques qu’ils considèrent comme plus importants que les bénéfices de la vaccination. C’est le cas notamment chez les tranches d’âge peu impactées par les effets du virus.
- Et/ou du fait d’une préférence marquée pour des technologies vaccinales plus traditionnelles.
Les difficultés rencontrées par les Français de l’étranger et par les étrangers résidant en France pour bénéficier du passe sanitaire après s’être faits vacciner avec un vaccin labellisé par l’OMS, mais non reconnu par l’EMA et/ou la France, interrogent. D’une part quant à la stratégie vaccinale mise en place en Europe et en France. D’autre part, quant aux moyens produits pour l’initier à l’instar du passe sanitaire.
Des actions pertinentes coordonnées bénéfiques à tous sans distinction
Les réponses viendront nécessairement au fur et à mesure des différentes études. En l’occurrence, celles menées par les instances scientifiques et/ou publiques quant à :
- La capacité de chaque vaccin autorisé à effectivement protéger son hôte et à restreindre au maximum la transmission en cas de contamination.
- L’impact réel des mesures restrictives, à l’instar du confinement, du couvre-feu et du passe sanitaire, sur le nombre de personnes décédées des suites d’une contamination à l’un des variants du Sars-Cov-2.
L’efficacité des vaccins à ARN messager et à vecteur viral, autorisés en France, est en chute libre face au variant Delta. Cependant, d’autres vaccins utilisant une technologie plus traditionnelle fondent de nouveaux espoirs. C’est le cas du candidat vaccin à virus inactivé VLA2001 du laboratoire franco-autrichien Valneva. Le Royaume-Uni lui a déjà commandé 100 millions de doses pour 2021 et 2022. Sa commercialisation devrait pouvoir débuter fin 2021.
En parallèle, plusieurs traitements médicamenteux anti-Covid-19 sont en cours de développement. Trois d’entre eux ont d’ores et déjà reçus l’aval de l’OMS et viennent agrandir l’arsenal disponible pour préserver les cibles identifiées de la Covid-19 : les personnes âgées et/ou celles présentant une ou plusieurs pathologies lourdes. L’ensemble de ces nouvelles avancées nécessiteront, plus que jamais, une stratégie sanitaire lisible par tous. Ainsi qu’une mise en application durable qui considère :
- Les réalités spécifiques individuelles dans leur globalité.
- L’inviolabilité du corps humain.
- Le consentement libre et éclairé.